Où l’on suit le parcours extraordinaire d’une urne absolument banale

1724, Lyon. Alors qu’il laboure son champ, un paysan trouve une petite urne en plomb. Elle n’a pas grand-chose d’exceptionnel, mais elle pourrait toujours intéresser les collectionneurs d’antiquités. Il la porte donc au père du Pineau, un religieux lyonnais. Celui-ci s’empresse de l’acheter ! Mais pas pour la raison que l’on croit...

Du Pineau décide de jouer un tour à son grand ennemi le père Colonia, un père jésuite qui prétend s’y connaître en antiquités... Et pour cela, notre religieux se fait faussaire : imitant la technique ancienne, il grave une inscription sur l’urne.

Les mots choisis par du Pineau font croire qu’elle contient les cendres d’un illustre personnage de l’Antiquité. Et pour que la plaisanterie soit complète, il la remplit avec des bouts d’os, des pièces antiques et les cendres de sa cheminée.

Par un intermédiaire, le religieux fait proposer l’œuvre au père jésuite pour enrichir sa collection. Colonia n’y voit que du feu ! Il pense avoir trouvé un trésor archéologique, et le crie sur tous les toits. Mais la supercherie est vite découverte. Tourné en ridicule et irrité d’être tombé dans le panneau, il laisse l’urne dans un coin. On n’en entendra plus parler pendant un long moment.

C’est en 2000 qu’elle refait surface dans un marché aux puces. Les spécialistes contemporains n’ont aucun mal à identifier que l’inscription est plus récente que le récipient. Pourtant, l’urne rejoint quand même les collections du Musée romain de Lyon... en tant que témoignage des pratiques de faussaires. Finalement, le père du Pineau aura bien réussi à en faire une œuvre digne d’un musée !

Pour moi, une journée sans canular, c'est un gruyère sans trou. Francis Blanche

Sous la plume d'Artips